On pourrait croire que la peinture de Jacques s’inspire de celle de certains autres artistes, et non des moindres.
Il n’y a rien de désolant à cela, rien d’anormal. Chacun trouve son inspiration ici et là , personne n’y échappe , fût-il le plus grand.
Mais tous font une synthèse des influences qui détermine leur propre style et Jacques a réussi à trouver le sien, reconnaissable du premier coup d’œil, puis plus encore si on s’approche de la toile, et qu’on effleure la touche.
Les fenêtres ouvertes sur la mer, et un bateau qui flâne, souvent garnies d’un bouquet de fleurs ou d’une femme stylisée, ont été un sujet de prédilection chez Matisse, Marquet, Camoin, Bonnard, Dufy , Puy…pour n’en citer que quelques uns des plus connus (et sans quitter la France).
Les grands paysages construits et découpés , aux couleurs arbitraires et aux ciels polychromes, font parfois penser à de Staël, aussi pour leur vibration et la sensation quasi physique de chaleur écrasante qui s’en dégage.
Une Provence imaginée et onirique s’installe sur les toiles à coups de cyprès, d’olivier, de lavande et surtout à coups de couteau dans une pâte épaisse. Je vous laisse nommer les maîtres en la matière..
Ses marines sont, comme chez nul autre pareil, prétextes à un maillage de l’espace où le désordre n’est qu’apparent, où chaque aplat trouve son écho, chaque ligne son pendant juste et affirmé.
Ce qui frappe d’emblée est la couleur. Jacques est un coloriste puissant et subtil à la fois. J’ai eu la chance de connaître ses premières toiles, plus abstraites, et déjà ce qui impressionnait était cette vibration colorée et le positionnement subtil des tons …mitoyens. Eh oui, dans ses toiles comme il fit dans sa carrière professionnelle de juge de Paix, Jacques cherche à ramener l’équilibre entre des forces contraires, à baliser les territoires, même célestes, à harmoniser ce qui semble inconciliable.
Ensuite, quelque soit le thème, il y a cette capacité rare à ordonner l’espace pour que chaque aplat (parfois fondu ou en ton sur ton) soit à une place qui apparaît immédiatement comme évidente.
Il y a aussi cette technique des cernes, de couleurs subtilement choisies, qui participent à l’attribution équilibrée de la surface au profit de chaque partie du sujet.
On ressent dans sa peinture le don qu’il avait de dire, lors de sa vie professionnelle, à chacune des parties au procès, ce qui lui revenait et là où elle devait céder la place à l’autre.
On y découvre parfois des vitraux, mais tout en matière plutôt qu’en transparence.
Jacques BOVY a toujours peint, et cela se sent, même s’il ne fait découvrir son talent que tardivement, à l’occasion d’une seconde naissance dont nous profitons tous.
Il vient vers nous avec une fraîcheur qui est celle de son âme, bonne et mesurée, nourri d’enthousiasme et de la puissance vraie, celle qui s’acquiert avec l’expérience d’une vie bien remplie.
Il crée une œuvre dense et foisonnante, avec acharnement et énergie. A son image.
Luc Désir